mercredi 19 juin 2013

Maurice Nadeau / Le grand dénicheur des lettres



  La Quinzaine littéraire

Inévitable de rendre ici à Maurice Nadeau ce qui lui revient : ma dette envers sa "Quinzaine Littéraire". Ce bimensuel au rythme de parution improbable, duquel je me suis nourri durant des années. Abonné très fidèle, comme je sais l’être quand il le faut, j’ai vu défiler dans les pages de cette revue, qu’il avait créée et pilotée dès 1966, tous les auteurs dont il traitait et que je continue de fréquenter, tant ses choix éditoriaux correspondaient le plus souvent aux miens.
Des années durant je me suis rendu au 43 rue du temple où je gravissais, avec les  palpitations du vice impuni,  les marches menant jusqu’à la rédaction. Des locaux exigus et hantés comme une survivance du XIX° siècle en plein XX°, où il fallait se faufiler entre tables et empilements de cartons et livres. J’y allais pour acheter par paires les grandes reliures bordeaux, avec imprimé sur la tranche, en caractères dorés tout aussi improbables, le titre pour lequel il s’est battu jusqu’au dernier souffle. Sur place, une collaboratrice enveloppait soigneusement les reliures dans du papier Kraft, qu’elle fermait  avec du papier collant (pas du scotch) et attachait avec de la ficelle. Sans oublier les tiges métalliques qu’il fallait insérer entre les pages centrales de chaque numéro et fixer dans un support prévu à cet usage pour les rassembler en un volume par année.
A mesure que le temps passait, la collection prenait de l’ampleur et occupait un espace tel que j’ai dû m’en séparer en l’offrant à un libraire éditeur basé dans le XIII° arrondissement avant son embourgeoisement Rue Racine.
J’en ai gardé quelques numéros spéciaux ou fétiches sur Walter Benjamin, Georges Bataille, Edmond Jabès, Fernando Pessoa, Joseph Brodsky,  voire Michel Seurat (mort en détention au Liban) ou plus récemment Benjamin Fondane.